Seconde Guerre mondiale : ces héros étrangers qui rêvaient d’une France libre
Au sein des réseaux de Résistance ou des bataillons de combattants, de nombreux héros venus des quatre coins de l’Europe ont joué un rôle actif – et ont parfois payé le prix fort – pour libérer la France du joug nazi. Portraits de cinq d’entre eux.
- Anciens combattants Azerbaïdjanais et Français célébrant la mémoire des Azerbaïdjanais engagés dans la Résistance en France
Ils s’appellent Ahmadiyya, Amado, Italo, Mustapha ou Vasil. Nés loin de l’Hexagone, leurs parcours les ont pourtant réunis autour d’une cause commune : libérer la France occupée par l’armée d’Adolf Hitler en juin 1940. Les livres d’Histoire les ont quelque peu oubliés, les jeunes générations n’en ont jamais entendu parler. Pourtant, chacun à son niveau, ces cinq hommes ont réalisé l’impossible. S’inscrire dans une Histoire plus grande qu’eux.
Azerbaïdjan : Ahmadiyya Jabrayilov, l’évadé de la Wehrmacht
Rien ne prédestinait Ahmedia Djebrailov à rejoindre le maquis français au printemps 1944. L’histoire commence un mois après l’opération Barbarossa en juin 1941 et le début de l’invasion allemande de l’Union soviétique. Venu de Shaki au nord de l’Azerbaïdjan, Djebrailov intègre l’école d’aviation de Nevinnomyssk en Russie. En 1942, alors en mission, le bombardier de ce jeune sous-lieutenant est abattu dans le ciel d’Ukraine. Fait prisonnier, emmené en Pologne, puis envoyé dans le camp de concentration Struthof en Alsace, il est transféré de force dans la Wehrmacht, et stationnée à Rodez dans l`Aveyron. Avec trois complices, au printemps 1944 il s`évade de l`hôpital militaire de Montauban et intègre un réseau local, le maquis Cabertat. Connu sous les pseudos d’Ahmed Michel puis de Kharko, l’Azerbaïdjanais harcèle l’occupant allemand lors de plusieurs opérations menées par son réseau.
Pour libérer le département du Tarn-et-Garonne, il s’engage dans le 1er groupe d’escadrons du 3e régiment de hussards sous le commandement du capitaine Delplanque. Au tournant 1944-1945, il participe aux campagnes des Vosges et d’Alsace. Il aura donc participé à une grande partie de la campagne de la Libération, à la fois comme combattant irrégulier du maquis, puis dans les rangs de l’armée française. Cet engagement plein d’abnégation, loin de son pays, lui vaut de recevoir la médaille commémorative de la guerre 1939-45, avec agrafe « Libération ». Démobilisé fin 1945, il regagne son Azerbaïdjan natal où il décèdera près de cinquante ans plus tard. Aujourd’hui, sa mémoire est encore honorée lors des rassemblements d’anciens combattants en France, et surtout dans son pays où il est un véritable héros national. La contribution de l'Azerbaïdjan à la victoire de la Seconde Guerre mondiale est méconnue : 300 000 personnes sur près de 700 000 mobilisées depuis l'Azerbaïdjan sont mortes héroïquement ou ont disparu. De plus, dans l'armée soviétique, Bakou a fourni 85% du pétrole utilisé.
Espagne : Amado Granell, l’ex-anarchiste libérateur de Paris
La guerre d’Espagne s’achève à peine cinq mois avant le début de la Seconde Guerre mondiale. Passée sous le contrôle du général Franco, l’Espagne voit nombre de ses républicains fuir vers la France via les Pyrénées, dont 150000 soldats. C’est le cas d’Amado Granell. Au cours de la guerre, Granell intègre le bataillon de la Nueve, composé de combattants défaits par Franco. Le 24 août 1944, la veille de l’arrivée triomphale de la 2e Division blindée du général Leclerc à Paris, un premier détachement de quelques blindés est envoyé vers la capitale. A sa tête, le capitaine français Raymond Dronne et Amado Granell, l’ex-capitaine anarchiste espagnol. Granell ordonne immédiatement de rejoindre l’Hôtel de Ville où il prend part aux derniers combats contre les soldats allemands qui tiennent encore quelques positions stratégiques. Le 26 août, lors de la descente des Champs-Elysées par Charles de Gaulle, c’est lui qui prend en charge le service de sécurité. Mais la guerre n’est pas terminée pour autant. Quelques mois plus tard, il prend part lui aussi aux campagnes des Vosges et d’Alsace, avant de devenir l’émissaire secret des exilés espagnols auprès de l’héritier du trône espagnol. Il recevra des mains du général Leclerc la légion d’honneur, qui aura ces mots : « S’il est vrai que Napoléon a créé la Légion d’honneur pour récompenser les braves, personne ne la mérite plus que vous. » Amado Granell Il mourra en 1972 avant d’achever la rédaction de ses mémoires, intitulées La guerre faite par un civil.